De toute évidence, Paul est très fâché contre la communauté de Corinthe. Comme il projette de la visiter, il doit mettre les choses au point. On sent qu’il a envie de dire sans ambages son inquiétude et ses reproches à ses frères et sœurs. Mais il a tant d’affection pour eux ! Comment va-t-il concilier sa colère avec son amour fraternel ? En prenant beaucoup de précautions et en exprimant d’abord son amour quasi paternel pour eux, à qui il a annoncé l’Évangile. Un exemple de tact dont on peut s’inspirer quand on a sur le cœur des reproches à faire à nos sœurs et frères, ou à nos dirigeants d’Église.
Et qu’est-ce qui permettra à Paul d’allier ainsi l’indulgence à la sévérité ? En mettant de côté toutes les réactions trop « humaines » (ou « selon la chair »). L’autorité de Paul ne vient pas que de son caractère ou de son charisme. Elle vient aussi de Dieu. C’est l’étonnante réalité de la vie de Christ en lui, décrite à maintes reprises dans ses lettres¹.
Christ vit en Paul. Et en nous ? Parvenons-nous à laisser toute la place à Jésus, à faire suffisamment d’espace à Jésus dans nos pensées et nos raisonnements quand nous nous exprimons ?


Au verset 5, Paul dit qu’il veut « emprisonner toute pensée pour l’amener à obéir au Christ ». Retenons cette forte image qui décrit l’importance du discernement pour éradiquer de la communauté les pensées « inspirées par Satan ». C’est une tâche pastorale partagée par tous les chrétiens. Dans cette lettre, pour dire « pensée », Paul utilise cinq fois un mot qu’on ne trouve pas ailleurs dans le Nouveau Testament : « noèma ». Il lui donne une connotation négative. Nous voyons là que les Corinthiens n’avaient pas ce discernement ; il fallait l’intervention de l’apôtre. Soyons vigilants quand des sœurs ou des frères nous rendent attentifs à des « pensées » qui ne viennent pas de Christ : il peut nous arriver de ne pas le réaliser par nous-mêmes.